UN DESTIN TRAGIQUE
Ils ont oublié que l’Histoire est tragique (Raymond Aron)
En 1978, l’ancien président du Conseil italien et chef de la Démocratie Chrétienne, Aldo Moro, était enlevé puis assassiné par les Brigades Rouges. 20 ans après son film Buongiorno Notte,
le talentueux réalisateur Marco Bellocchio - encore nominé au dernier Festival de Cannes - revient sur cet évènement qui, pour les Italiens, fut un traumatisme puissant, avec une
série télévisée : Esterno Notte.
Une oeuvre exceptionnelle
Tout, absolument tout, est excellent dans cette série en six parties : à chaque épisode, Bellocchio met sa loupe sur les protagonistes de ce drame politique qui secoua l’Italie à
la fin des années de plomb. Tour à tour, le réalisateur resserre sa focale sur le personnage Moro et les ambitions qu’il nourrit pour le pays, sur le ministre de l’intérieur Francesco Cossiga que la folie guette, sur le Pape Paul VI, ami de la famille Moro, sur un couple de terroristes, confronté à la démence de leur organisation et sur l’épouse d’Aldo Moro au courage lucide. Tous ces personnages se retrouvent pour le dernier acte qui s’apparente à une tragédie antique.
La série est servie par un casting impeccable avec, Fabrizio Gifuni dont la ressemblance avec le leader italien est confondante ; citons aussi Margherita Buy qui interprète avec justesse l’épouse de Moro ainsi que Gabriel Montesi et Daniela Marra qui incarnent un couple de terroristes impliqué dans l’enlèvement.
En mettant en scène ce couple, Bellocchio pointe l’extraction sociale des responsables Brigadistes : souvent issus de la classe moyenne et diplômés de l’enseignement supérieur,
fanatisés par une idéologie dévoyée mais aussi travaillés, pour certains, par des contradictions judéo- chrétiennes mal refoulées. Avec la lutte armée, ils prétendent émanciper le prolétariat mais les rares ouvriers de l’organisation sont assignés des tâches subalternes.
Sur Arte, Bellochio précise : « J’ai choisi de faire un récit et donc, j’avais besoin de temps », ajoutant « cette nécessité a imposé le format d’une série de six heures et non un film ». Pour comprendre l’état d’esprit de Moro séquestré pendant 55 jours, Marco Bellochio s’est appuyé sur la centaine de lettres que le chef de la Démocratie Chrétienne a adressé à sa famille et à ses amis politiques durant sa détention.
La réussite de cette oeuvre tient en peu de mots : bien que tout le monde connaisse l’issue tragique, le téléspectateur, tenu en haleine jusqu’au dénouement, arrive à croire à une possible libération de l’otage ! Bellocchio su créer ...
Pour lire la suite de cet article paru dans le numéro 44 de Lumières Internationales , cliquez ici
"Esterno notte" reste disponible sur ARTE boutique ici
Sur l'enlèvement d'Aldo Moro, retrouvez ici les archives de l'INA
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