En écoutant quotidiennement les médias audio-visuels, je suis sidéré par la montée des tics de langage que véhiculent aussi bien les journalistes que les personnalités politiques ou encore les experts de tous poils.
Ouvrez votre poste et vous serez abreuvés ad nauseam par une avalanche de « du coup », un tsunami de « au jour d’aujourd’hui », une cascade de « en mode », un raz de marée de « on ne va pas se mentir », un déluge « d’effet waouh », une inondation de « il est cash », un déferlement de « oui mais pas que », et, pour faire bonne mesure, un geyser du très présidentiel « en même temps », dont même les opposants au locataire de l’Élysée usent et abusent à qui mieux mieux !
Pardon, chers lecteurs, pour cette litanie volontairement un peu longue ; promis, j’arrête là, cet inventaire qui agacerait certainement le placide Prévert.
Soyons juste, il s’agit là d’expressions éphémères qui passent presqu’aussi vite qu’elles nous agacent. Mais, hélas, ces vocables disparaissent au profit d’autres expressions tout aussi incongrues ! Bien sûr, la solution radicale pour parer à ces nuisances de vocabulaire consisterait à fermer télévision et radio.
Sauf que la vie familiale prend le relais avec les enfants ou les petits enfants qui vous submergent de « trop pas », de « j’avoue », de « relou », de « meuf », de « vénère », de « kiffer grave » ou encore de « chelou » !
Pour en sortir et briser cet encerclement dialectal, l’ultime recours serait de se réfugier dans les sphères du monde du travail. Mais que nenni ! Ayant travaillé de longues décennies dans le secteur tertiaire, j’ai essuyé salves et rafales de mots-jargons, souvent empruntés à l’anglais du business, c’est-à-dire le « globish » qui fait se retourner dans sa tombe le grand Shakespeare.
Un concentré de ce sabir donnerait quelque chose comme ça : « je sais que tu es très corporate, mais tu taffes trop et tu risques le burnout. Prends donc un week-end prolongé pour faire un break. Si tu rates le prochain meeting qui se fera par conf call, je te débrieferai asap et te forwarderai le reporting. »
Bref, nous sommes cernés ! Que faire ? Fermer les écoutilles et s’isoler au risque de se couper de la vraie vie ? Impossible ! pas question de se transformer en ermite ! Alors, au lieu d’attendre passivement un retour à meilleure fortune, allumons, autant que nécessaire, sur tous les supports possibles, des contrefeux en utilisant, sans modération, la belle langue de Molière.
Retrouvez ce post dans le numéro 43 de Lumières internationales ici
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